Fiche de danse

Avant-deux de Ligné-Les Touches

Terroir

Pays d'Ancenis

Vidéos et musiques

 

Rédacteurs

Cette fiche reprend le texte rédigé par Jean Renaud en 1972 pour l’établissement de la fiche de danse lorsque cet avant-deux est devenu danse imposée pour le concours Kendalc’h de 1973. Ainsi qu’il était noté « c’était l’aboutissement de nombreuses années de recherches menées par Jean Renaud et le cercle celtique d’Orvault, avec notamment l’aide de Julien Terrien de Pannecé. Cette rédaction de 1972 a été inspirée par ces recherches, confrontées à celles du Docteur Tricoire qui avait bien voulu fournir une documentation sur ses propres recherches et donner son avis sur la rédaction proposée ». Michel Guillerme, s’étant toujours référé aux recherches, écrits et enseignements de Jean Renaud, son maître en la matière, reprend avec Sandrine Guinel, Annaïg Bouligand et Eric Hubert l’enseignement et le suivi de cette danse populaire de l’ancien Comté nantais.

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Famille de danses

Contre-danse

Structure de la danse

Danse unique

Accompagnement traditionnel

Violon
Accordéon
Gavottage

Forme de la danse

Image extraite de la vidéo de référence tournée lors de la journée d’étude sur l’avant-deux de Ligné-Les Touches le 13 octobre 2013 à Nort-sur-Erdre.

Appellation

Le terme « avant-deux » a son origine dans le fait qu’au départ de la danse, sur deux couples en vis-à-vis, seuls deux danseurs (un cavalier et la cavalière qui lui fait face) démarrent la danse. Alors le musicien annonce « En avant-deux ». Le terme « de travers » a été ajouté en zone frontalière pour le distinguer de l’avant-deux « de long ». Le nom du bourg de Ligné a été retenu pour l’appellation, car une anecdote signalée par Jean Renaud situe  bien ce lieu dans le contexte historique et de pratique de cet avant-deux de travers spécifique.

Situation géographique et historique

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Terroir

Les communes citées sont incluses dans le pays des avant-deux dits de travers.

  • A l’ouest : la rive gauche de l’Erdre
  • Au nord : Abbaretz, la Meilleraye, Le Grand et le Petit Auverné, Bonnoeuvre
  • Au sud : la Loire, mais le sud-ouest autour de Carquefou semble l’avoir oublié depuis longtemps.
  • Au nord : un autre avant-deux dit de «Châteaubriant», à l’est l’avant-deux de long des marches Bretagne-Anjou.

Popularité

C’est une danse vantée par les anciens, considérée comme difficile et souvent réservée aux bons danseurs. C’est la danse dominante de cette aire géographique, reliée au pays de Châteaubriant dont l’avant-deux, quoique différent, semble avoir une source commune. Antérieurement, des rondes auraient existé. On en connaît peu et les anciens âgés de 70 à 80 ans à l’époque des recherches (années 1960), ne les ont pas dansées. Mais ils ont tous dansé l’avant-deux. On le dansait 30 minutes d’affilée (Couffé).

Informateurs, témoignages et transmission

La transmission s’effectuait par les anciens aux plus jeunes, en famille, enseignée par les parents ou durant la guerre de 1939-1945, pour se «distraire». Quelquefois, un musicien «pédagogue» faisait office de professeur (Joseph Malherbe, tailleur à Joué-sur-Erdre et violoneux, avait décomposé le pas : fait exceptionnel). à l’époque des recherches, c’était pratiquement une danse disparue. Cependant, elle était encore dansée par les anciens dans les bals de noce. Les jeunes s’y mettaient alors. Beaucoup de personnes de 40 ans l’avaient dansée.

Occasion de danse

Comme toutes les autres danses : noces, travaux collectifs («foulées la place»), fêtes villageoises, veillées dans les villages, dans les maisons en famille, spontanément en sorties entre jeunes gens dans la campagne (sur route !) et... dans les prés !

Origine et famille de danse

Cet avant-deux date probablement fin du XVIIIème siècle, début du XIXème siècle. Cette danse est antérieure aux quadrilles qui ne l’ont jamais supplantée. C’est peut-être une ancienne contredanse.

Forme et structure de la danse

C’est la forme de tous les avant-deux. Chaque couple fait face à un autre couple, la cavalière à la droite de son cavalier. On aligne de part et d’autre autant de couples que l’on veut.

Technique de pas

La danse peut se diviser en trois phases : l’avant-deux, le valsé et l’avant-quatre.

L’avant-deux dansé par la moitié des danseurs (32 temps)

Les danseurs d’une rangée et les danseuses en vis-à-vis, les autres restent à leur place. Cavaliers et cavalières avancent légèrement au départ de la danse pour se trouver à un mètre environ l’un de l’autre. Cette avancée se fait en amorçant le premier pas de danse.

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Comptés : et un, deux, et trois, et quatre...

Premier temps « et » : Départ en appui sur les deux pieds, simultanément élévation du talon droit (quelquefois même sursaut) et décollement du pied gauche (le mouvement vient de la jambe en appui).

Temps 1 : Pendant l’abaissement du talon droit, la pointe du pied gauche se porte vers l’avant où il se pose, talon légèrement soulevé, sans porter le poids du corps et devançant le pied droit d’une longueur.

Temps 2 : Le pied gauche exécute un départ franchement latéral gauche et prend appui à 20 ou 30 cm du pied droit, mais reste en avant de la longueur d’un demi-pied environ.

Temps « et » : Le pied droit se rapproche du pied gauche et prend appui toujours décalé d’un demi-pied.

Temps 3 : Le pied gauche se pose à gauche de 10 cm et prend appui, sans chasser, toujours décalé.

Temps « et » : Identique au temps «et» précédent.

Temps 4 : Identique au temps 3.

Le pas de la cavalière en vis-à-vis se fait symétriquement à celui du cavalier (départ vers la droite, piqué du pied droit) de façon à ce qu’ils partent dans la même direction, vers l’extérieur de leur couple.

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  • Forme de l’avant-deux

Pour le cavaliers 32 temps de l’avant-deux sont composés :

  • d’un déplacement latéral gauche sur 4 temps
  • d’un déplacement latéral droit sur 4 temps
  • d’un déplacement latéral gauche sur 4 temps
  • d’un déplacement latéral droit sur 4 temps
  • d’un tourné sur place sur 4 temps : à la fin du 16ème temps, le cavalier tourne dans le sens contraire des aiguilles d’une montre (son vis-à-vis dans l’autre sens) en marquant bien les appuis qui restent semblables au pas.
  • d’un déplacement latéral droit sur 4 temps
  • d’un déplacement latéral gauche sur 4 temps
  • d’un déplacement latéral droit sur 4 temps

A la fin du 32ème temps, le cavalier prend sa cavalière de droite par la taille, soit après un ou deux temps de «commande» chantés ou parlés, soit directement en portant le pied droit dans sa direction et attaquant le valsez. Le départ cavalière est symétrique.

En avant-deux

Le « valsez » (16 temps)

Le couple tourne sur place pendant 16 temps, en faisant un tour complet tous les quatre temps, à l’aide d’un pas de pivot pour les hommes, pas de pivot aussi pour les femmes ou pas décrit ci-après. Le danseur tient sa cavalière par la taille avec la main droite et sa main gauche est soit placée dans la main droite de sa cavalière, bras demi-tendu (position de valse), soit tient le bras droit de sa cavalière au-dessus du coude, celle-ci posant alors sa main droite sur l’épaule gauche de son cavalier.

  • Pas de pivot

Les deux jambes étant à l’assemblée, plier le genou gauche et poser la pointe du pied gauche sur le sol.
à chaque temps, se soulever à l’aide de la pointe du pied gauche placée ainsi en arrière et se reposer sur le pied droit à plat, mais en le tournant d’un quart de tour (sens horaire). Donc, le mollet gauche propulse, et le pied droit, soulevé par l’effort de la jambe gauche, se contente de se reposer, toujours au même endroit (comme un pivot), bien que tournant d’un quart de tour chaque fois. Une fois le pied droit posé, la jambe droite fléchit immédiatement, ce qui permettra à la gauche de travailler plus en force et ce qui donne à ce «valsé» un mouvement vertical de soulevé et baissé à chaque temps. La fille peut exécuter le même pas de pivot, mais elle préfère souvent se laisser soulever à chaque temps par son cavalier (des épaules duquel elle est solidaire), pour se laisser retomber sur les deux pointes de pieds en même temps. Elle saute du pied droit (en repliant la jambe gauche en arrière) au premier temps et retombe sur les deux pointes de pieds joints au deuxième temps. Elle ressaute du pied droit au troisième temps, etc.

Valsez
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L’avant-quatre (ou « balancez ») (16 temps)

à la fin du «valsez», le cavalier lâche la main de sa cavalière et, la tenant toujours par la taille de sa main droite, ils font face au couple vis-à-vis dans l’attitude décrite sur le croquis. Le pas est alors celui de l’avant-deux, mais exécuté d’avant en arrière : les 4 premiers temps en avant, 4 temps en arrière, 4 temps en avant, 4 temps en arrière en positionnant toujours le pied qui a piqué en avant d’un demi-pied par rapport à l’autre. Cavaliers et cavalières partent alors du pied gauche. On a vu aussi parfois les cavalières partir du pied droit. à la fin de l’avant-quatre, la danse reprend au début (avant-deux) avec les danseurs qui ne l’ont pas dansée la première fois, puis «valsez», avant-quatre et ainsi de suite. Parfois les musiciens ajoutent, avant de reprendre, un ou deux temps de pause qu’il convient de respecter.

 

Avant-quatre

Style

C’est un style plat, le talon décollé ne porte pas au sol mais en reste très proche. Une flexion plus ou moins prononcée des genoux accompagne le pas. Le premier temps de l’avant-deux et de l’avant-quatre est marqué, quelquefois sauté. Les temps sont bien marqués mais sans faire de pas chassés ni syncopés. Certains danseurs décrivent des arabesques avec les jambes pour lier leurs temps entre eux, limitant ainsi le déplacement de travers. Ils dansent alors «sur le carreau de la cuisine», leur déplacement s’inscrivant dans un carré. D’autres, notamment dans la région des Touches, font progresser l’avant-quatre en obliquant plus ou moins vers la gauche. L’originalité réside surtout dans l’attitude des danseurs : ils tiennent les bras écartés du corps d’environ 45°, les coudes étant mi-fléchis de façon que les mains viennent à 10 cm du corps environ, ces mains étant mi-fermées, paumes vers l’arrière. Les avant-bras sont immobiles, soit balancés modérément de façon naturelle. Les épaules sont portées vers l’arrière. II faut noter surtout un jeu de genoux tout en souplesse.

Avant-deux, images extraites de la vidéo de référence tournée lors de la journée d’étude sur l’avant-deux de Ligné-Les Touches le 13 octobre 2013 à Nort-sur-Erdre
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Avant-deux puis pas du valsez, images extraites de la vidéo de référence tournée lors de la journée d’étude sur l’avant-deux de Ligné-Les Touches le 13 octobre 2013 à Nort-sur-Erdre

CD de référence

Ce sont tous des enregistrements de prospection, la plupart réalisés sans danseurs et sur des supports différents, les tempi ne peuvent donc pas être pris en référence. Les airs de 2 à 7 proviennent des archives sonores de Dastum 44.

  1. Accordéon diatonique - Air enregistré par Michel Guillerme à l’automne 1972 à Saint-Mars-la-Jaille lors d’une réunion de musiciens traditionnels organisée par Jean Renaud
  2. Violon - Louis Bourgeois (1920-1991), enregistré à Carquefou en 1979 par Raphaël Garcia et Mme Séveno
  3. Violon - Joseph Malherbe de Joué-sur-Erdre, enregistré dans les années 1930 sur 78 tours
  4. Accordéon diatonique - Rémi Paudoie de Saint-Mars-la-Jaille, enregistré en 1989 par Patrick Bardoul
  5. Gavottage - Pierre Gauthier de Vritz - Le Pin. Il ne s’agit pas d’un air d’avant-deux de travers, mais il est intéressant pour la technique. Enregistré en 1965-1969 par Jean Tricoire
  6. Gavottage - Antoinette Perrouin de Couffé, enregistré par Jean Renaud en 1966
  7. Accordéon diatonique - Edouard Béziau de Pouillé-les-Côteaux, enregistré par Jean Renaud en 1966
  8. Accordéon diatonique - Air par Yves Mornet (cf 1er air) avec annonces résiduelles
  9. Accordéon diatonique - « Comm’ te voilà touillé, guené » par Yves Mornet, structure ABA’B’, air recueilli par Jean Renaud
  10.  Accordéon diatonique - « Y a-t-un nid dans l’prunier » par Yves Mornet, structure AA’BB’, air recueilli par Jean Renaud
 

Collectage Dastum

 
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Au centre, Jean Renaud
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Louis Bourgeois (1920-1991)
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Mariage à Teillé des fille Bliguet.
Collection Michel Guillerme

Mode vestimentaire

On peut considérer que le passage du XIXe au XXe siècle a vu le déclin sinon la fin du port du costume traditionnel féminin sur quasiment tout le territoire de l’ancien  comté nantais (le costume masculin en tant que tel ayant disparu encore plus tôt). Sur les photos de mariage datant au plus tard de 1914, seules quelques femmes âgées portent le costume complet. Concernant la coiffe, et contrairement au costume, chaque paroisse est identifiable par le paillage et le repassage de la coiffe appelée dormeuse. La dormeuse portée à Ligné, Couffé, Les Touches, Pouillé-les-Côteaux, Mouzeil, comme ses voisines, est en tulle et
se décline suivant les occasions : au pignon et à la passe brodées pour le mariage et les cérémonies, sans broderie pour le deuil et les veuves… Elle a perdu son dalais (bande
de dentelle gauffrée à l’arrière que l’on retrouve à Nantes, la Basse-Loire, le Vignoble et le Pays de Retz), mais surtout elle est immédiatement repérable pour l’oeil averti par cette succession de petits couchés et plats verticaux réalisés sous les lignes du paillage à coeur.

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Femme de Ligné (en taille) Collection : Michel Guillerme
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Dormeuse de fête de Ligné dans son paillage ancien. Collection : Michel Guillerme

Ressources

  • Archives sonores de Dastum 44

Remerciements

  • Complément aux écrits de Jean Renaud : Viviane Cocadin et Marcel Choblet
  • Partie costume : Michel Guillerme
  • Partitions : Yves Mornet

Rappel

La Commission danse de Kendalc’h tient à rappeler un certain nombre d’éléments qui prévalent à l’élaboration de cette  fiche de danse. Il en est strictement de même pour toutes les fiches à ce jour publiées. La version proposée dans une fiche de danse fait suite à une étude longue, profonde et sérieuse qui s’appuie sur des sources et témoignages fiables. Cette fiche qui se veut un témoignage intangible, valorise une version, probablement la plus répandue de cette danse. Mais tout naturellement, même si nous la considérons comme majeure, cette version ne peut en aucun cas se prévaloir d’être l’unique version, il peut exister des variantes, liées à l’époque de référence, les lieux, l’âge et l’implication des personnes qui ont été porteuses de cette tradition et qui nous l’ont transmise. Penser différemment, serait totalement contraire à l’éthique qui entoure notre action vis-à-vis de notre environnement patrimonial.