Collection Annie Raulo
Groupe vestimentaire
Ce costume de cérémonie, revêtu principalement lors des mariages et des grands pardons comme celui de Sainte-Anne-d’Auray, était porté dans une cinquantaine de communes du pays vannetais. Il se caractérise pour les femmes par la coiffe « tri kintr », portée dans toutes ces communes . On observe toutefois des variantes plus ou moins importantes pour d’autres éléments du costume ; par exemple, les femmes alréennes portaient plutôt le costume à petit col et les vannetaises, le costume à châle ; de même, le haut col de la veste et du gilet de l’homme est caractéristique du pays d’Auray.
Collection Annie Raulo
Situation géographique et historique
Un sous-titre de section
Nous détaillerons dans cette fiche, le costume à petit col, principalement porté dans les communes suivantes : Arradon, Baden, Brandivy, Belz, Brec’h, Carnac, Crac’h, Erdeven, Etel, Grand-Champ, La Trinité-sur-Mer, Landaul, Locmariaquer, Locoal-Mendon, Larmor-Baden, Locmaria-Grand-Champ, Plescop, Ploeren, Pluvigner, Ploëmel, Plougoumelen, Plouharnel, Plumergat, Pluneret, Saint-Philibert, Camors en partie (sud de la commune), ainsi que Sainte-Anne-d’Auray qui alors faisait partie de la commune de Pluneret et Le Bono qui faisait partie de celle de Plougoumelen.
Costume féminin
Contrairement au costume masculin qui n’était porté que par les paysans, toutes les femmes, à l’exception des femmes de notables et des citadines, portaient le costume traditionnel (mode col ou châle).
La robe (broh)
Les premières robes apparaissent vers 1850 mais se propagent surtout à partir de 1870. Elles sont principalement noires, mais on retrouve encore des robes de couleur bleue ou verte en 1900. Elles sont très longues ; pour protéger le bas de la robe, on rajoutait une petite frange dans le bas, qu’on appelait la balayette ou la balayeuse « bro d’ur skuberèz ». Les robes de cérémonie étaient confectionnées principalement en alpaga, mérinos ou en soie pour les familles les plus aisées et agrémentées de bandes de velours de soie. Le haut de robe est très cintré, doublé d’un tissu épais ; dans le dos, deux bandes de velours sont cousues en arrondi pour suivre les emmanchures en plissant le velours. Le devant est souvent moins soigné. Cette partie qui est plus ou moins recouverte de velours est cachée par la bavette du tablier. Une petite poche en velours est cousue sur le devant du bustier, dans laquelle on glisse la petite montre attachée au sautoir. La robe s’ouvre par devant et se ferme avec des lacets ou des crochets. Avant 1900, l’encolure (partie dos) est presque droite ; elle commence à se creuser légèrement et continuera jusqu’en 1920. L’envergure du bas de la robe est généralement grande : jusqu’à 2,80 mètres et on trouve à la taille un « fronçage » très serré, appelé « tuyaux d’orgue » (dans le dos). Au début du XXe siècle, peu de robes ont une bande de velours en bas, cette bande va se généraliser rapidement par la suite, pour atteindre une vingtaine de centimètres vers 1915. Les manches sont des manches larges et droites. Avant 1900, elles sont agrémentées d’une toute petite bande de velours (5 cm) qui est passée à 10, puis à 20 cm et plus.
Détail du dos de robe.
Collection Cartopole de Baud
Collection Cartopole de Baud
Le tablier (dantèr)
Jusqu’à 1908 environ, les plus beaux tabliers sont en soie moirée noire ou de couleur claire. Un peu avant 1910, apparaissent les premiers tabliers brodés mécanique en velours de soie ; c’est la grande mode des tabliers à « petits bouquets ». Le tissu est acheté déjà brodé (bandes de 50 cm environ), et on confectionne ensuite le tablier suivant la taille de la personne. La bavette (er bauzér) est grande et couvre tout le devant de la robe.
Les broderies représentent toujours des motifs floraux. Les couleurs choisies sont toujours en harmonie avec le tissu, en préférant les tons pastels et en évitant les couleurs vives et criardes. Le tablier est plus court que la robe, laissant voir le velours lorsqu’il y en a. La taille de la ceinture est fonction de chaque femme et fait environ les 3/4 de tour de taille. On le ferme avec des lacets noirs noués sur le devant (ce nœud est donc caché par la bavette). Avant 1900, les poches sont arrondies ou carrées, elles deviennent ensuite allongées, triangulaires et sont prises dans les fronces (sauf dans les communes côtières qui ont conservé les poches arrondies jusqu’en 1910).
Collection Catopole de Baud
Collection Annie Raulo
La coiffette (er c'houifèt pa er c'houif bihan)
Les coiffettes sont généralement sans ou avec peu de broderie ; quelques-unes sont brodées sur tulle (tulenn brodet) mais sans découpe et il n’y a pas de dentelle cousue sur le pourtour. Elles ont des lacets (stegelleu) qui sont noués sous le menton. Après 1915, elles deviendront beaucoup plus brodées, on rajoutera une dentelle sur le pourtour et les lacets disparaîtront.
La coiffe : er c'houif tri kintr
Au milieu du XIXe siècle, deux coiffes coexistent dans le pays vannetais : la coiffe du bourg d’Auray et la coiffe de la campagne. La coiffe du bourg évoluera pour devenir la coiffe « tri kint » : la jobeline (ar jobelin). Cette coiffe « tri kint » (trois coins) est d’abord en mousseline, en gaze, puis en tulle ; elle arrive à hauteur des oreilles. Elle n’est pas brodée et n’a pas de dentelle au début du siècle, même pour les plus riches ; on rajoute ensuite une petite dentelle « picot », puis une dentelle un peu plus large.
La coiffe est réalisée sur mesure par des couturières avec des techniques bien précises. Elle comprend plusieurs éléments :
Collection Annie Raulo
Les autres dentelles
La guimpe (gimp)
La guimpe est une bande de dentelle cousue sur une bande de mousseline et de tissu formant un rectangle ; elle peut être très brodée comme le col. Glissée sous la robe, elle est plus ou moins visible.
Le col (kolèd)
Au début du XXe siècle, les cols sont cousus sur un « corps », sorte de petite chemise sans manche, lacées sur la chemise de jour. Plus tard, ce corps sera supprimé et le col sera directement attaché sur la robe. Les cols peuvent être très brodés à cette époque (même si la coiffe ne l’est pas).
Les manchettes (mancheteu)
Elles sont en tulle brodé mécanique ; ce sont des manchons qui sont glissés sous la manche de la robe. Le tulle brodé est cousu à un tissu en mousseline et attaché à la robe.
Collection Annie Raulo
Collection Annie Raulo
Collection Annie Raulo
Les dessous
Les femmes portent une chemise de jour ainsi qu’un ou plusieurs jupons (broh indan). Au début du siècle, les jupons ne sont pas toujours blancs mais de couleur vive (rouge, jaune, bleu, vert...). Les femmes portant des jupons blancs n’hésitaient pas à les montrer en relevant le bas des robes les jours de mauvais temps.
Les accessoires et bijoux
Au début du siècle, les femmes portent avec ce costume des bottines en cuir à lacets ; elles ont des parapluies ; certaines ont aussi des étoles longues de couleur foncée ou claire. En ce qui concerne les bijoux, le sautoir (er ranjenn) porté avec ou sans coulisseau est à la mode chez les femmes aisées. Elle peuvent également porter une chaîne avec une croix et parfois des boucles d’oreilles.
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Costume masculin
Le costume de l’homme était porté uniquement par les paysans, d’où son nom de « guskemant poezant » - costume paysan. Il n’a pratiquement pas évolué durant cette période.
La veste et le gilet (se ha jilet)
Certains éléments de la veste et du gilet sont conçus de la même façon : encolure en V, poches garnies de velours et haut col rigide. Ces deux pièces de costume sont courtes et ne dépassent pas le haut des hanches. La veste ne ferme pas, il n’y a d’ailleurs pas de boutonnière. Elle reste ouverte permettant de bien mettre en valeur le gilet.
La veste est en drap mais le gilet peut être en tissu plus fantaisie. Des bandes de velours de soie d’une dizaine de centimètres recouvrent les poches, les revers et le dos du col. Elles sont cousues après un pliage spécifique et ne recouvrent en réalité que la partie supérieure de la poche (elle est deux fois plus profonde).
Le pantalon (lavreg)
Avant 1850, les hommes portaient des bragou berr, puis des bregueu, pantalons à pont copiés sur les pantalons des marins : généralement de couleur gris clair rayé de foncé ou gris foncé ou noir rayé de blanc. Ces bregueu sont remplacés petit à petit par des pantalons à braguette, les couleurs restant les mêmes. Seules les communes côtières du pays d’Auray ont conservé ces bragueu jusqu’en 1920 environ. Ils sont confectionnés dans des tissus assez épais, sont longs et recouvrent les chaussures.
La chemise et accessoires
La chemise est portée principalement avec un nœud (noir ou crème) ; la cravate se généralise après 1910. La montre à gousset complétait ce costume.
Collection Annie Raulo
Le chapeau (tok)
Il est en feutre, que le chapelier fabriquait lui même à partir de laine de mouton ; il y rajoutait des poils de taupe, de veau, ou de lapin afin d’obtenir du feutre taupé, du mélusine ou de bleogat (poils de lapins). Les chapeliers se procuraient leur matière première auprès des taupiers et des pilhotourion (chiffonniers). Par contre, les rubans de velours qui entourent le chapeau et les guides (gideu velouz hir) et qui tombent dans le dos proviennent de Lyon comme pratiquement tout le velours de soie à cette époque. La largeur et la longueur du velours varient selon la richesse des familles.
Mariés de Pluneret, en 1908
On remarque le chapeau avec ses guides
Collection Annie Raulo
Costume de mariage (dilhad euredenn)
Pour le marié, le seul signe distinctif est le petit bouquet de fleurs d’oranger épinglé sur le revers de la veste.
Pour la mariée, par contre, les ornementations sont nombreuses. Il y a tout d’abord la couronne de boutons et de fleurs d’oranger qui était généralement achetée chez le bijoutier en même temps que les alliances. On retrouve jusque dans les années 1910 deux guirlandes qui partaient de l’arrière de la couronne et tombaient dans le dos. La taille de la couronne est fonction de la richesse de la famille : plus la couronne est haute et ouvragée, plus elle est chère. Un bouquet de fleurs d’oranger en cire, d’où partent plusieurs guirlandes est également épinglé sur la bavette du tablier.
des hommes.
Collection Annie Raulo
Costume enfant
Collection Romuald Hervé
Très tôt, dès quatre ans pour les garçons, dès cinq ou six ans pour les filles, les enfants sont habillés comme leurs parents : costume de fête et costume de tous les jours. Les tissus utilisés sont toutefois mois somptueux, et on prend soin lors de leur confection de faire des plis religieux sur les robes, tabliers, jupons et pantalons… afin de pouvoir les rallonger au fur et à mesure que l’enfant grandit.
Une femme de Pluneret et ses enfants,
vers 1914.
Collection Annie Raulo
Ressources
- Creston René-Yves, Le costume Breton, Coop Breizh
- Le Rouzic Zacharie, Archéologue et photographe à Carnac
- Buffet Henri François, En Bretagne morbihannaise
- Le Corre Martial, Les sonneurs bretons
- Belz Jorj, Dilhad Breizh
- Lancien Martine, Le costume traditionnel vannetais, 1988
- Le Goff Nathalie, Les métiers du costume breton dans le pays vannetais de 1789 à 1950, 1997
- Gardais Odile, Evolution du costume féminin et masculin en pays d’Auray de la fin du XVIIIe siècle à nos jours, 2004
- Musée de la carte postale, Cartopole, Baud
- Archives départementales du Morbihan
Remerciements
- Romuald Hervé