Fiche terroir

Pays de Douarnenez
Bro Penn Sardin

Cornouaille

Rédacteurs

Fiche rédigée en 2020 par Jean-Pierre Gonidec

Pages associées

 
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Communes du pays de Douarnenez

Douarnenez (composé  de Douarnenez, 8 Ploaré, Pouldavid-sur- Mer et Tréboul)

Le Juc’h

Poullan-sur-Mer

Pouldergat

Ci-contre : vue du port de  Douarnenez. Photo Jean-Pierre Gonidec

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Le Terroir

Le port de pêche de Douarnenez est le coeur de ce pays  qui occupe une surface de 95 km². Il est situé sur la côte  sud-est d’une large baie qui porte son nom. Le nord du  plan d’eau est fermé par la presqu’île de Crozon, dont les  hautes falaises répondent à celles du Cap-Sizun situé au  sud. À l’ouest, entre la pointe du Van et le Cap de la Chèvre  les eaux de la baie de Douarnenez retrouvent celles de la  mer d’Iroise. À l’est enfin, la vaste plaine du Porzay étale  ses longues plages de sable fin, entrecoupées de falaises  déchiquetées. Les tempêtes d’hiver, ramènent parfois à  la lumière les forêts de chênes pétrifiés ensevelies sous  le sable. Leurs racines tournées vers le large témoignent  de la montée des eaux il y a près de 5000 ans. Sur l’eau  se reflète les sommets du Menez-Hom, point culminant  de la chaîne des Montagnes Noires et la légende indique  qu’en dessous repose la fabuleuse Ville d’Ys. Voulu par  le roi Gradlon, la riche cité fut engloutie à cause des  péchés de sa fille Dahut. Si certaines traces ont disparus  à Pouldahut, devenu Pouldavid, et notamment la marque  laissé dans un rocher par Morvarc’h le cheval du roi  délesté du poids de la pécheresse, des douarnenistes  montrent parfois une ardoise récupérée par un aïeul et  dont ils jurent qu’elle provient d’un toit de la ville que les  ancres ou les filets ont remontée il y a bien longtemps par  un soir de tempête. 

Jadis dépendant du bourg de Ploaré dont le haut clocher  domine la baie, le port de Douarnenez est devenu à la fin  du XIXe et au début du XXe siècle le premier port de pêche  à la sardine grâce à ses 900 chaloupes, mais aussi aux  nombreuses conserveries de poissons qui employaient  une forte main-d’oeuvre principalement féminine. Depuis  1945, Douarnenez est composé de quatre anciennes  communes : Douarnenez, tirant sa richesse de la mer,  Tréboul et Pouldavid-sur-Mer se partageant entre la terre  et la mer, et Ploaré lié à la terre. Trois autres communes  rurales complètent le pays de Douarnenez : Le Juc’h,  (ancienne trêve de Ploaré), Poullan-sur-Mer et Pouldergat  (dont dépendaient jadis Tréboul et Pouldavid). 

Si les communes rurales ont toujours tiré leur revenu  du travail agricole, la pêche fut la principale ressource  nourricière de Douarnenez. C’est notamment la sardine  mais aussi les autres poissons bleus qui firent sa fortune.  L’Empire romain optimisa cette pratique ancienne en   installant les premières usines maçonnées sur une grande  partie du littoral de la baie. La production de garum,  condiment composé de chair de poisson fortement salé,  était expédiée aux confins de l’Empire. La conservation  par pressage et saumure puis par la mise en conserve  assura du Moyen Âge aux années 1980 la richesse de la  ville et justifie le nom de Penn Sardin (tête de sardine)  encore donné à la population. Attesté en 1732, c’est aussi  la dénomination de leur pays. Mais elle ne s’y limite pas.

En effet, à cause d’une mode vestimentaire commune, la  mode Penn Sardin identifie la Cornouaille maritime dans  son ensemble, comprenant toute la presqu’île de Crozon,  la partie est et sud du Cap Sizun jusqu’au port d’Audierne  et d’Esquibien, l’important port de Concarneau au coeur  du pays de l’Aven et quelques petits ports de pêches  anciens du pays bigouden.

Symbole en France des luttes ouvrières menée par des  femmes au début du XXe siècle, la population Penn Sardin  a révélé le monde industriel et maritime tumultueux de  Bretagne très éloigné des clichés idylliques ou avilissants  de l’époque. L’élection d’une première française aux  élections municipales à Douarnenez en 1925, alors que  celles-ci n’avaient pas le droit de vote, y a contribué  également fortement.

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Douarnenez - le  grand pont. Collection  Musée de Bretagne
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À gauche, tissage  de filets à l’usine  Pichavant à Tréboul.  À droite, femmes de  Douarnenez tricotant,  photo par Georges  Nitsch (1866 - 1941)
Collection Musée  de Bretagne

Les danses et intruments de musique

Les ports de pêche ont tôt fait d’abandonner les danses  locales pour pratiquer celles venant d’ailleurs, apporté  parfois par les marins eux même. Important port de  commerce au Moyen Âge, Douarnenez recevait déjà d’autres  cultures européennes sur son sol. À la fin du XIXe siècle,  valses, mazurka et autres danses animaient donc les bals.  Toutefois, en 1881 les marins pratiquaient encore les danses  traditionnelles. Nous en avons gardé peu de traces, mais  une description indique que la gavotte se dansait alors en  chaînes entremêlées, exécutées aux violons dans les noces  de la ville. Le dimanche, les marins et les paysans dansaient  entre eux sous le regard de leurs femmes pour qui la danse  était interdite ce jour-là. Au début du XXe siècle, dans les  communes rurales, la danse était proche de la gavotte glazik.  Elle se pratiquait en quadrette (au moins à Ploaré) et en  couple (au moins à Pouldergat). Le jabadao terminait la suite  traditionnelle comme souvent en Cornouaille. Les sonneurs  de biniou et de bombarde venaient principalement des  environs et notamment du pays bigouden, mais aussi du  Juc’h. Les danses se pratiquaient à l’occasion des noces, des  assemblées de travail ou des grandes réjouissances. Mais dès  le XVIIe siècle le clergé et notamment Don Michel Le Nobletz  se plaignait que la jeunesse de Ploaré se retrouvait le soir au  moins trois fois par semaine pour s’amuser et danser...

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Ci-contre : danses à  Ploaré, costumes de  Ploaré et borledenn. 
Collection particulière 















Ci-contre : mariage 
à Douarnenez.  Collection particulière

Le costume

Mode Penn Sardin

La mode Penn Sardin est principalement celle de la  population des ports de pêche du sud-Finistère, sauf dans  les ports du pays bigouden créés seulement au XIXe siècle, où  les femmes portent la mode paysanne avec la haute coiffe.

Costume de cérémonie

Le costume féminin de cérémonie du début du XXe siècle  se composait d’un long châle totalement noir brodé à la  pointe, bordé de macramé et de franges. Il portait le nom  de grand mouchoir. En dessous un corsage et une jupe à la  mode citadine de couleurs parfois vives se complétaient  d’un tablier en soie façonné à petit devantier. Selon  l’époque il couvrait le bas d’une guimpe à volant  remontant le long du cou, ou un barège fin permettant  un large décolleté. La coiffe Penn Sardin en forme de  bonnet était réalisée en filet ou en tulle dont le fond et la  bordure se couvraient de broderies. Elle se maintenait en  place par deux lacets couronnant la tête et se nouant sur  la nuque juste au-dessus de deux ailettes redressées et  appelées « chinkelloù ». La manière de la porter identifiait  chaque port. À Douarnenez, deux ou trois bonnets selon  la période, associés à un peigne courbe au début du XXe  siècle, permettaient de coiffer les cheveux avant de poser  la coiffe elle-même. 

Ci-contre : costume  de cérémonie de Douarnenez avec une cornette.
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À chaque génération apparaissaient  des changements vestimentaires, et notamment en  1928 la réduction de la jupe sous les genoux. C’est aussi  la période ou le costume commença à disparaître ne  conservant que la coiffe sur une tenue citadine à la mode.  Pour les noces du début du XXe siècle, la jeunesse portait  la longue cornette en filet brodé monté sur les bonnets.  Les châles étaient noirs en tulle brodé incrusté parfois  de soie. La mariée portait le même habillement tout en  blanc. Pour les processions, la jupe de ce costume blanc  était en tulle transparent qui laissait voir les broderies du  jupon de dessus et se couvrait d’un tablier également en  tulle présentant les mêmes motifs brodés que le châle.

Ci-contre : costume  de cérémonie de Ploaré.

Mode féminine de Ploaré

La Penn Sardin était associée à un costume particulier  variante de la mode glazik : la mode de Ploaré. Lors  des cérémonies pour les plus fortunées, le corsage  composé d’un gilet et d’un corselet à deux volutes  s’ornait de nombreuses rangées sinueuses de broderies  très réglementées. Bien que composées de plusieurs  couleurs, l’orange y dominait. Un petit col en tulle ou en  filet brodé souvent assorti à la coiffe Penn Sardin reposait  sur l’arrière du corselet. Sur une partie de la commune du  Juc’h ainsi que dans quelques fermes reculées de Ploaré,  pouvait se porter le costume classique du pays glazik.  Le milieu des années 1920 vit peu à peu se répandre les  motifs en perlage multicolore sur l’ensemble des tenues  des femmes.

Les coiffes

La mode de la Cornouaille maritime pouvait influencer  différemment la campagne aux environs des ports de  pêche. Dans le pays de Douarnenez, et dans une grande  partie du Cap-Sizun jusqu’à Plouhinec, la coiffe Penn  Sardin se portait chez les paysannes même pour le jour  du mariage. Dans la campagne douarneniste, depuis  le XIXe siècle elle partageait l’honneur d’orner les têtes  des ploaristes avec la grande coiffe borledenn issu du  pays glazik. Au début du XXe siècle encore, au Juc’h et à  Pouldergat, la Penn Sardin pouvait céder temporairement  sa place à une borledenn pour coiffer les mariées les plus  aisées.

Ci-contre, coiffe Penn  Sardin en filet brodé. Collection particulière

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Femmes du Juc’h en  grand costume, portant  la borledenn à la place  de leur Penn Sardin  habituelle. Collection  Le Carton Voyageur
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Mode masculine de Ploaré

Les hommes des communes rurales portaient aussi  un costume à la mode de Ploaré. Pour les plus aisés,  la veste noire s’ouvrait sur le gilet bleu serré dans un  turban rouge. Veste et gilet s’ornaient alors des mêmes  broderies rigoureuses que les corsages féminins. Au  début du XXe siècle, un chapeau de feutre aux deux larges  guides retombant dans le dos, complétait l’habillement.  Il remplaçait le modèle précédent composé de six guides  comme dans le pays bigouden. Les mariés pouvaient  selon leur richesse couvrir l’ensemble du ruban et les deux  guides du chapeau, de galons de dentelles métalliques  dorés, de motifs cartonnées couverts de sequins brillants  ou de broderies en cannetille.  Au quotidien et pour les personnes les moins aisés, les   broderies cédaient la place à des parements en velours  noir. Ils étaient associés à un drap de laine fin et noir pour  les femmes, et entièrement bleu roi pour les hommes  dont le turban prenait aussi la teinte.

Les Gras

Les costumes démodés comme partout étaient recyclés  pour un usage domestique. Cependant de nombreuses  pièces finissaient leur vie dans l’apothéose des Gras. Ce  carnaval est toujours très vivant à Douarnenez, et même  si les pièces originales sont heureusement devenus rares,  certaines copies de costumes traditionnels s’y retrouvent  parfois encore en bonne place.

Carte postale  « Habitants de  Douarnenez »,  costumes de Ploaré.  Collection Musée  de Bretagne

Ressources

Collecteurs et témoignages

Dès la fin des années 1970, des publications ont été  réalisées sur Douarnenez. Vendues chacune entre 800 et 3 000 exemplaires à une population de 15 000 habitants, l’élan de collectage s’est intensifié dans tous les domaines : historique, culturel, patrimonial, économique, sportif ou festif. Parmi les auteurs : Yves Tanneau, Anne Denez-Martin, René Pichavant, Yvonne Jaouen, Herlé Dénez, Per Dénez, Michel Mazéas, Jean Pencalet…

Exemples de publications :

• BSAF, plusieurs articles sur le pays de Douarnenez  depuis 1873
• Champilla, revue, 12 numéros, de 1977 à 1992
• Le douarneniste comme on le cause - 1500 mots et  expressions, 1978 
• Les cahiers de l’Iroise, plusieurs articles sur le pays de  Douarnenez depuis 1960
• Mémoires de la ville, 39 numéros - de 1983 à 2017

Bibliographie

• Belbéoc’h Henri, Douarnenez, au bonheur des  peintres, éditions Palantines, 1992
• Gonidec Jean-Pierre, Les Costumes de la Cornouaille  maritime, éditions Coop Breizh, 2016
• Le Boulanger Jean-Michel, Douarnenez l’histoire  d’une ville, éditions Palantines, 2000
• Pérennes Henri, La vie du vénérable dom Michel Le  Nobletz, éditions Prud’Homme, 1934
• Theuriet André, Douarnenez, paysages et  impressions, Revue des deux mondes, 1881

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Mariage à Douarnenez.  Le marié ne porte  pas le costume  paysan de ses parents  mais le costume  citadin de la ville  portuaire. Collection  Patricia David