Fiche de danse

Rond de Sautron

Terroir

Pays de Nantes - Basse-Loire

Rédacteurs

Cette fiche a été réactualisée en 2023. Dans les années 60, une première fiche avait été élaborée par Jacques Praud en concertation avec Georges Paugam et Jakez Josset. En 1990, cette danse entrant au répertoire commun de la Confédération Kendalc’h, une réactualisation de la fiche était effectuée dont la rédaction s’est faite sous la direction d’Yvette Peaudecerf qui a participé au collectage dans l’équipe de Jacques Praud. La rédaction avait été confiée à Michel Guillerme pour la partie danse proprement dite. Pour cette fiche de danse Heritaj la réactualisation a été effectuée avec les mêmes rédacteurs. La confédération Kenleur a désigné Annaïg Bouligand comme référente de cette danse pour le Répertoire Commun et Yvette Peaudecerf comme personne ressource.

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Famille de danse

Branle ancien
Branle double

Structure de la danse

Danse unique

Accompagnement traditionnel

Chant à « répounage »

Forme de la danse

Appellation


Cette danse a été nommée Rond de Sautron car elle a été localisée principalement sur la commune de Sautron. Les informations sur cette danse ont été collectées auprès de M. Joseph Durand qui habitait la commune : démonstration de la danse et transmission des chants. Le rond de Sautron était connu rive droite de la Loire, dans les communes avoisinantes (Basse-Indre, Couëron, La Chabossière) mais pas dansé. On préférait d’autres danses de la Basse-Loire comme le quadrille de Basse-Indre, les aéroplanes de Couëron, le menuet de Sautron… témoignages de M. Mme Le Denmat (à Basse-Indre) et M. Souchay (La Chabossière).

Situation géographique et historique

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Sautron, commune à l’ouest de Nantes, se situe à la  limite nord de la Basse-Loire aux confins du sillon de  Bretagne sur l’axe Nantes-Vannes. Le terme Basse-Loire  définit le territoire rassemblant les communes situées de  part et d’autre des rives de la Loire, rive droite à partir de  Nantes/Chantenay jusqu’à Montoir de Bretagne / Saint-Nazaire et rive gauche à partir de Bouguenais jusqu’à  Paimbœuf où s’est développée une forte industrialisation au tournant du XIXe  et du XXe  siècles. 

Dès 1025, Sautron est citée dans un texte ancien à propos de sa forêt. Au XVe et XVIe siècle, celle-ci couvrait une grande partie du territoire parsemé de quelques fermages. Sautron se résumait alors à une route coupant la forêt domaniale rappelant l’axe Nantes-Vannes d’aujourd’hui. Sous François II - père de Anne de Bretagne – on y accède aisément soit par la grande route, soit par la Loire et Couëron où le Duc réside au château de la Gazoire. Cette forêt domaniale de Sautron verra passer les grandes chasses notamment celles organisées par François II.

Progressivement, le paysage change et les habitants également. A côté d’une population de forestiers s’installent dans les nouvelles tenues des fermiers cultivateurs. Aujourd’hui, de la forêt, il ne reste qu’un grand souvenir, des lieux-dits en quantité et Sautron est devenue une commune résidentielle étendue jusqu’aux portes de Nantes. Sautron, en retrait de la rive droite de la Loire, n’a pas été impactée directement par l’industrialisation, de Loire mais on peut penser que le fleuve était un moyen de circulation du bois liée à l’exploitation forestière.

Informateurs, témoignages et transmission

Cette danse a été collectée par le Cercle Celtique des îles d’Indre, dans les années 1963 – 1965. L’équipe de collectage était composée de Jacques Praud, président du groupe, et des membres du cercle dont faisait parti Yvette Peaudecerf. Lors de cette enquête, la première fiche du rond de Sautron avait été rédigée, en concertation avec Georges Paugam et Jakez Josset. 
M. et Mme Le Denmat habitant à Basse-Indre ont fourni un certain nombre de témoignages. Mr Souchay, accordéoniste réputé en Basse-Loire, connaissant la danse et les chants mais le rond de Sautron ne faisait pas partie de son répertoire. 

Occasion de danse

Le Rond se dansait à l’occasion de toutes les réjouissances collectives et familiales, les noces principalement, dans les veillées, avec une importance particulière à la Saint-Jean où il s’exécutait sur un air spécifique « La Grand St-Jean », jour où les « sonneries de bassin » étaient aussi de circonstance.

Origine et famille de danse 

Nous sommes en présence d’un rond « résiduel » appartenant à la grande famille de danses issues du fonds ancien. Le Branle double a donné naissance à un grand nombre de danses d’une région allant des portes de Nantes à l’est, au Pays de Lorient à l’ouest pour son implantation en Bretagne. On trouve dans cette grande famille de danses issues du branle double les En dro, Tour, pilé menu, ronds (Paludier, Saint-Vincent, Sautron…). 

Forme et structure de la danse 

Il s’agit d’un rond, chaîne toujours fermée. C’est une danse unique ne s’inscrivant pas dans une suite réglée. 

Tenue et mouvement des bras

Les danseurs et danseuses se donnent les mains, bras en bas au démarrage. Position des mains : la prise des mains se fait sur tout la paume. Les cavaliers ont les paumes des mains tournées vers le centre « portant » les mains des cavalières. L’oscillation se fait à partir des épaules et non des coudes. Aux temps impairs, les bras vont vers l’avant et au temps pairs, les bras vont vers l’arrière. L’amplitude est plus importante vers l’avant que vers l’arrière, toutefois, l’élévation des bras à l’avant ne dépasse pas la hauteur de la taille, à l’arrière les bras dépasse légèrement l’axe du corps Le mouvement de bras est souple, il s’exécute avec régularité. Il « accompagne » le chaloupé. 

Technique de pas

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Le déplacement s’effectue vers la gauche et la progression est régulière. 

•  Temps 1 : Pied gauche se déplace et prend appui sur la gauche
• Temps et : Pied droit se place parallèle au pied gauche sans le dépasser
• Temps 2 : Pied gauche se déplace et prend appui sur la gauche
• Temps 3 : Pied droit prend appui derrière le gauche et forme un angle droit avec celui-ci 
• Temps et : Pied gauche se déplace vers la gauche et prend appui
• Temps 4 : Pied droit se déplace en gardant sa position du temps 3, prend appui derrière le gauche et forme un angle droit avec celui-ci. Cette orientation est conservée pendant le temps 1 suivant. Le pied reprend la position parallèle au pied gauche au temps « et ».
Au temps 3 et au temps 4 le pied droit se place derrière le talon du pied gauche sans le collé. 
Il est à noter que comme dans toutes les danses orignaires du branle double, la position du pied gauche ne varie pas dans la danse (même orientation, même ligne de danse).

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Style

Le style de cette danse est dit « chaloupé ». Il s’agit d’effectuer un léger mouvement de rotation plus visible au niveau des épaules vers la gauche sur les temps 1 et 2 et vers la droite sur les temps 3 et 4. Sur ces mouvements de chaloupé la progression sur la gauche est conservée. Les genoux sont souples, ils servent à amortir. La pulsation est totalement régulière sur les 2 mouvements (il n’y a pas d’accentuation sur les genoux au 2ème mouvement). Ce style « chaloupé » est un caractère type de la Basse-Loire. Les pieds se déplacent en effleurant le sol et prennent appui toujours d’emblée à plat.

Accompagnement musical

Les informateurs ont fait référence seulement à un accompagnement chanté. Si l’on considère l’exiguïté du terroir de cette danse, le collectage tardif, nous sommes là en présence d’un répertoire plutôt riche, ce qui conforte dans la certitude d’une tradition ancienne chantée. Le chant est interprété par les danseurs. Une forme très particulière, apparemment inconnue dans le reste de la Haute-Bretagne a été attestée par les informateurs. Ils l’appelaient le « répounage » (réponnage). C’est un chant de forme soliste-chœur avec « tuilage ». Le ou les chanteurs qui « répounent » commencent à chanter les dernières syllabes de la phrase musicale. Le « tuilage » se fait à la fois par le soliste et par le chœur. Cette technique de chant permet d’éviter les ruptures dans la danse. Le style du chant est coulé, sans temps forts. Le tempo : 84- 88 noires minutes, suivant le chant le tempo peut aller jusqu’à 92-94 noires minutes. L’interprétation est dite légato. À noter que tous les chants, à l’exception de celui de la variante « tourné piqué », peuvent accompagner le rond de Sautron simple. Par contre un chant de rond simple ne peut pas accompagner un rond piqué. 

Un jeune Capitaine 

S ( Un jeune capitaine, revenant de guerre, cherchant ses amours
R [ Un jeune capitaine, revenant de guerre, cherchant ses amours 

S ( Les a tant cherchés, qu’il les a trouvés au fond d’une tour
R [ Les a tant cherché qu’il les a trouvé au fond d’une tour 

Dites-moi la belle, qui vous a fait mettre, dedans cette tour
C’est mon très cher père qui m’y a fait mettre par rapport à vous 

Joli capitaine, demande à mon père quand j’en sortirai
Général de France, votre fille demande quand elle sortira 

Joli capitaine, ne t’mets pas en peine, tu ne l’auras pas
Je l’aurai par terre, je l’aurai par mer ou par trahison 

Le père en colère, passe la rivière jette sa fille à l’eau
Son amant plus sage, se met à la nage et vite la retira 

À la première ville, son amant l’habille tout en satin blanc
À la deuxième ville, son amant l’habille tout d’or et d’argent 

À la troisième ville, son amant l’habille en épousement
Elle était si belle, qu’elle passait pour reine dans le régiment.

Variantes

La forme originelle de la danse est ce qu’on appelle le rond simple. Il existait une variante nommée « rond piqué » qui, selon M. Joseph Durand, induisait un esprit de jeu (repérage du piqué, déséquilibre des voisins …). Le rond piqué avait un répertoire spécifique de chants.

Le rond piqué 

Il est composé de 2 parties :
Première partie : Ronde identique à la formule du rond simple
Deuxième partie : les piqués

Formule d’appui du piqué + schéma du piqué

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• Temps 1 et 2 : Exécuter un changement de pas vers la gauche comme pour le rond simple, mais au temps 2, le pied gauche revient perpendiculaire à la ligne de danse.
• Temps 3 : En appui sur le pied gauche, piquer avec la pointe du pied droit, juste derrière le talon gauche
• Temps 4 : Toujours en appui sur le pied gauche, refaire le même piqué
• Temps 5 : Le pied droit vient se poser à l’assemblée du pied gauche, et non à quelque distance de celui-ci. Le pied gauche quitte alors l’appui et …
• Temps 6 : … vient piquer à son tour derrière le pied droit On amorce chaque piqué en levant le pied libre à la hauteur de la cheville de la jambe d’appui (voir dessin). 

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N.B. – L’analyse de la ronde a été faite sur 4 temps, au lieu de 8 réels. Cette formule de comptage « pratique » a été adoptée afin de pouvoir harmoniser la valeur des temps de la ronde avec ceux des piqués, qu’il a été plus logique de décomposer sur 6 temps « pratiques » au lieu de 12 réels.

Le rond tourné piqué 

Il existe donc une variante tourné piqué pour lequel il n’a été collecté qu’un seul chant. Elle est composée de 3 parties. 

Première partie : ronde identique au rond de Sautron simple. 
Deuxième partie : le tourné. Les danseurs effectuent deux tours sur eux-mêmes en 8 temps, (un tour en 4 temps), en pas marché mais en gardant le style chaloupé. Le départ se fait du pied droit, et les danseurs tournent vers la droite (sens des aiguilles d’une montre). Un léger mouvement de bras accompagne ce tourné (balancé en alternance bras gauche, bras droit) en commençant avec le bras gauche (bras et pieds sont inversés).
Troisième partie : Le piqué. Il est identique à la formule du rond piqué. 

CD de référence

Enregistrement effectué par le cercle celtique des îles d’Indre en 1990 lorsque le rond de Sautron avait été retenue comme danse imposée pour le concours 1991. Le chant est mené par Yvette Peaudecerf, et le « répounage » par les membres du groupe. 

Rond de Sautron «simple» :
1. Un jeune capitaine
2. Le rossignol
3. Qui choisissons-nous 
4. Sous les lauriers blancs
5. Sur les bords de la Loire 

Rond de Sautron «piqué» :
6. Y’ a’ core dix filles qu’ont des amants
7. Le déserteur
8. Le Grand Saint-Jean
9. Quand on est à Pâques 

Rond de Sautron «tourne-piqué» :
10. Il y’avait une fête 

 

Mode vestimentaire

D’un point de vue des modes vestimentaires, l’ensemble du territoire du Comté nantais présente une très grande homogénéité. Les modes vestimentaires en usage en Basse-Loire s’inscrivent parfaitement dans cette affirmation. 

Les hommes pour se marier ou assister aux grandes cérémonies familiales ont depuis fort longtemps adopté les modes citadines à l’instar de quasiment tous les hommes de haute Bretagne. La mise des femmes pour leur mariage, ou ceux auxquels elles assistent et plus couramment pour sortir, est fort ressemblant à celle des femmes des campagnes, bourgs et villes d’un vaste terroir qui va d’Ancenis à la Roche Bernard, et du Grand-Fougeray à Clisson. 
Jusqu’au tout début du XXe siècle, la toilette a été complète. Avant les années 1880, époque où apparaissent les caracos en satin ou soie, quelquefois très richement travaillés à la mode en vigueur, les femmes portent sur la plupart des photographies des caracos de couleur plus ou moins foncée en lainage, très ajustés, aux manches étroites et droites, et aux cols et emmanchures rehaussées de velours. Les jupes godronnées à l’arrière sont généralement noires, en beau lainage. Pour le mariage, il n’est pas rare de porter un châle blanc en tulle. Ce châle couvre les épaules et la pointe dans le dos dépasse à peine le haut de la jupe.
Les autres châles plus couramment portés sont des pointes, fixées à trois ou quatre plis maximum. Le tablier de style nantais à grande bavette baleinée se fixant de part et d’autre des épaules, sur les plis du châle, termine cette mise. 

Châle de mariage en tulle brodé porté en Basse-Loire, collection de Michel Guillerme.
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Amélie Fourage, née le 13 février 1884 (20 ans sur l’image). Grand-mère de Jacqueline Leguay

Enfin, la coiffe appartient à cette grande famille des dormeuses qui n’est que particularités. 
Alors que tous les terroirs au nord de la Loire ont perdu leur dalais (dentelle sous le pignon), ici comme à Nantes et à Orvault il a été conservé. Une autre caractéristique est la passe, plus longue que partout ailleurs. Paillée, bien sûr, la dormeuse présente un « méplat » sur le dessus. 
Enfin et surtout, on la reconnaîtrait entre toutes les familles par son pignon triangulaire rentée. De Basse-Indre à Vigneux est portée une dormeuse à dalais; avec la passe parfaitement appliquée sur le haut de la tête et le chignon non-natté fait relever le dalais sur les deux côtés, signe bien identifiable sur les photographies. 
Le déclin de la toilette complète se produit au tournant des XIXe et XXe siècle et les jeunes femmes vont alors adopter « la taille », la tenue des bourgeoises et de celles qui les imitent. 

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A gauche, dormeuse à pignon rentré dite du Sillon, collection de Michel Guillerme.  A droite, Yvonne Civel, portant la coiffe de Sautron, collection d’Yvette Peaudecerf.

Ressources

Principaux collecteurs(1963 - 1965) : 
• Jacques Praud 
• Cercle celtique des îles d’Indre 

Bibliographie

• Les Annales de Nantes et du Pays nantais N° 248 – 1993 – Un millénaire à Sautron - Christian Y.M. Kerboul
• Æstuaria - 2001 – « La Basse-Loire » : Du mot au territoire 1836 – 1935 – Anne Vauthier-Bézier CRHMA – Université de Nantes
• Le Pays Nantais – Emile Gabory – La région de la Basse-Loire
• La Basse-Loire Tome II – Jean-Luc Ricordeau – février 2000

Remerciements

Responsable du dossier : Yvette Peaudecerf
Actualisation et relecture de la fiche : Yvette Peaudecerf et Michel Guillerme
Historique : Yvette Peaudecerf
Rédaction mode vestimentaire : Michel Guillerme
Responsable Commission Heritaj : Michel Guillerme

Rappel

La Commission danse de Kenleur tient à rappeler un certain nombre d’éléments qui prévalent à l’élaboration de cette  fiche de danse. Il en est strictement de même pour toutes les fiches à ce jour publiées. La version proposée dans une fiche de danse fait suite à une étude longue, profonde et sérieuse qui s’appuie sur des sources et témoignages fiables. Cette fiche qui se veut un témoignage intangible, valorise une version, probablement la plus répandue de cette danse. Mais tout naturellement, même si nous la considérons comme majeure,  cette version ne peut en aucun cas se prévaloir d’être l’unique version, il peut exister des variantes, liées à l’époque de référence, les lieux, l’âge et l’implication des personnes qui ont été porteuses de cette tradition et qui nous l’ont transmise.  Penser différemment, serait totalement contraire à l’éthique qui entoure notre action vis-à-vis de notre environnement patrimonial.