Groupe vestimentaire
Ces vêtements étaient portés par les paysannes et les paysans à Pluneret et dans tout le pays d’Auray tous les jours pour le travail. Ils sont spécifiques au travail et diffèrent des costumes portés le dimanche et lors des cérémonies ; le dimanche, les femmes portent une robe agrémentée de velours ; pour le travail, elles portent une jupe.
Marie Le Nocher, née en 1849 à Pluneret, mariée à Plumergat en 1873 avec Joseph Audic.
Collection Marie-Noëlle Audic-Brun
Situation géographique et historique
Ces vêtements étaient portés dans les communes suivantes : Arradon, Baden, Brandivy, Belz, Brec’h, Carnac, Crac’h, Erdeven, Etel, Grand-Champ, La Trinité-sur-Mer, Landaul, Locmariaquer, Locoal-Mendon, Larmor-Baden, Locmaria-Grand-Champ, Plescop, Ploeren, Pluvigner, Ploëmel, Plougoumelen, Plouharnel, Plumergat, Pluneret, Saint-Philibert, Camors en partie (sud de la commune), ainsi que Sainte-Anne-d’Auray qui alors faisait partie de la commune de Pluneret et Le Bono qui faisait partie de celle de Plougoumelen.
Costume féminin
Les vêtements de travail féminins étaient variés et pouvaient différer selon les saisons, les travaux effectués, la condition sociale. Au début du XXe siècle, elles portaient principalement un costume composée d’une jupe, d’un caraco et d’un tablier sans bavette, mais continuaient à porter un costume plus ancien et les vêtements du dimanche jusqu’à usure complète.
Photo Philippe Tassier, Collection archives départementales du Morbihan
La jupe
Jusqu’à la fin du XIXème siècle, les jupes sont en couleur (principalement de couleur brune), mais à partir de 1890, elles sont noires, réalisées dans un lainage et montées sur une ceinture large de 2 à 3 cm par des fronces, ensuite elles seront montées sur la ceinture avec des plis plats. Elles peuvent avoir une poche qui se cache sous le tablier.
Le caraco
C’est un chemisier de coton généralement noir, mais il pouvait être avec des motifs (petites fleurs, rayures…), avec un col rond ou un col chemisier. Il est ouvert sur le devant et fermé par des pressions ou des boutons. Il existe plusieurs modèles : certains étaient ornés de petits plis religieux horizontaux ou verticaux sur la partie haute du caraco. Il est serré à la taille grâce à des pinces. Il se forme ainsi une basque qui est masquée devant par le tablier, mais visible dans le dos car il est porté par-dessus la jupe. Les manches sont longues et serrées au poignet.
Le tablier - en dantèr
Il est de coton, noir ou de couleur, uni, à petites fleurs, à petites rayures ou à carreaux. Pour aller dans les champs, il était plutôt sombre (moins salissant). Il est porté avec ou sans bavette (bojèr) au début du XXème ; par la suite, tous les tabliers portés avec la jupe et le caraco seront sans bavette. Il est confectionné sans bavette, ou celle-ci est repliée et cachée.
La coiffette - er c’houifèt, er c’houif bihan
Avant le XXème siècle, les femmes portaient une coiffette de coton qui couvrait bien les cheveux ; elle a été remplacée progressivement par la coiffette en tulle portée au XXème avec la coiffe du dimanche et la coiffe de travail (pas de broderie sur la coiffette avec la coiffe de travail). La coiffette maintenait le chignon ; les cheveux étaient bien plaqués avec une raie au milieu. Pour ces deux coiffettes, des lacets sont noués sous le menton (ceux-ci disparaitront progressivement plus tard). Ils sont plus larges pour la coiffette en coton, plus ancienne. Certaines photos montrent des femmes portant seulement la coiffette, mais ce n’est pas la majorité des photos, surtout à cette période. Cela se généralisera plus tard.
Les coiffures
Pour les fêtes, une seule coiffe était portée par les femmes : la coiffe « tri kintr ». Par contre pour le travail ou pour tous les jours, les coiffures étaient diverses.
La coiffe blanche
La coiffe, en piqué de coton blanc, en mousseline ou en piqué fantaisie (alternance de piqué de coton et de mousseline) portée tous les jours, est confectionnée comme la coiffe en gaze, en mousseline ou en tulle du dimanche (la coiffe tri kintr), mais elle n’a pas de repli et pas de « pli-éperon ». Elle est amidonnée mais plus légèrement que les coiffes « tri kintr » du dimanche.
La coiffe noire (jobelen du) ou de couleur (jobelen ruz)
La coiffe noire ou de couleur appelée « jobelen du », « jobelen ruz » ou « bugulez » est faite en drap. Elle est recouverte de bandes de velours de soie. Confectionnée comme la coiffe blanche, on observe toutefois une particularité dans la confection du fond de coiffe sur certains modèles : les plis sont cousus ; dans ce cas, il n’y a pas de lacet. Octave-Louis Aubert, dans son livre « les costumes bretons » parle de la « bugulez », coiffe de travail dont se coiffent, dans la région d’Auray, les gardiennes de bestiaux (bugulezed) d’où elle tire son nom. Confectionnée en drap noir, elle est doublée de sergé ou de flanelle rouge, grenat, bleue ou noire. Cette coiffe noire était portée seulement avec le costume de tous les jours et par les paysannes. Garnie d’un ruban de velours noir, elle a l’avantage de ne nécessiter aucun amidonnage ou repassage. Pour plus de tenue, les couturières mettaient « une ficelle au bout » ; plus tard, ce fut un fil de fer.
Le chapeau de paille
Les femmes, comme les hommes, portaient l’été des chapeaux de paille qui les protégeaient mieux du soleil que la coiffe.
Le foulard ou fichu
La coiffe pouvait être remplacée par un foulard (fichu) ), en particulier pour les travaux dans les usines de conserves à Quiberon et Etel, les travaux agricoles ou la relève du sel. Les paysannes pouvaient le porter également sur la coiffe, sans doute pour se protéger du vent ou du froid. Quand elles ne portaient pas le fichu sur la tête, elles le mettaient autour de leur cou.
Paysans allant au marché à Pluneret.
Collection Le Carton Voyageur
Les sabots - er boteu koët
Avec ces vêtements, elles portaient des chaussettes de laine et/ou des chaussons de feutre noir renforcé de peau avec des sabots de bois. Dans le Morbihan, il y avait 3 formes de sabots : celle de Locminé, celle de Guemené sur Scorff et celle de Camors. Pluneret portait la mode de Camors, comme nous l’a confirmé la fille du dernier sabotier de Pluneret (Paul Le Méné, né en 1899 à Pluneret) que nous avons rencontré. Pluneret ne semble pas avoir compté beaucoup de sabotiers comme en attestent les registres d’état civil. Par contre, Camors en comptait encore 80 en 1936. C’est donc naturellement à Camors que l’on trouve aujourd’hui le dernier sabotier.
Vêtements chauds
Quand il faisait froid, elles mettaient sur leurs épaules une pélerine, un châle ou un gilet en laine.
La robe du dimanche
Elles portaient également des robes du dimanche abîmées, pour « les finir » avec une coiffe de travail, un ou deux tabliers de coton comme sur la photo de droite (la femme, de Pluneret, porte un tablier avec bavette et un autre sans par-dessus).
Femmes de Pluneret dans les années 1950.
Collection Annie Raulo
Des pièces de vêtements du XIXe
Ce costume est peu connu. Après avoir regroupé et étudié les divers documents que nous avons trouvés (peintures, photographies, inventaires après décès, écrits divers, témoignages…), nous en avons conclu qu’il se composait d’une chemise de jour, d’un jupon, d’une jupe, d’un corselet, d’un tablier, d’une coiffette et d’une coiffe. Ces vêtements étaient réalisés dans des tissus tissés localement : chanvre, lin et laine (tout ce qui pouvait se produire à la ferme). Le tissu était plus ou moins bien tissé et la qualité très variable : les écrits des voyageurs du XIXème parlent de « bure », « ratine » ou « cadi ». Les inventaires après décès mentionnent des jupes d’« étoupe ». Pour déterminer les couleurs, nous nous sommes basés sur les inventaires après décès qui donnent quelquefois des indications sur les couleurs des pièces de vêtement (rouge, bleu, vert, brun). Des peintres, notamment Jean Frelaud de Vannes, ont peint des scènes champêtres qui montrent bien les couleurs, confirmant les écrits ou témoignages recueillis. Buffet, dans son livre « en Bretagne morbihannaise » mentionne que les couleurs dominantes dans le Vannetais au XIXème étaient le rouge et le brun.
La chemise de jour
Les chemises étaient en chanvre ou en lin plus ou moins tissées finement. Celles des femmes sont amples (prévues pour les grossesses), avec des manches ¾ sans poignet généralement. Elles se portaient avec un petit col de toile fine ou sans col.
le jupon - er broh dindan
Il était en chanvre, lin, coton, laine. Le chanvre était souvent tissé avec de la laine pour adoucir le contact avec la peau. Il était de couleur, très souvent rouge comme le mentionnent les inventaires après décès et les personnes rencontrées. Elles pouvaient porter plusieurs jupons, surtout l’hiver.
La jupe - er lost broh
Les jupes étaient larges et longues, pratiques pour faciliter le travail dans les champs surtout pour se baisser. Sur le devant, on pouvait mettre un tissu tissé plus grossièrement (cette partie est cachée par le tablier). Quand il faisait très chaud, les femmes ne mettaient pas toujours les jupes pour aller travailler dans les champs ; elles étaient en jupon.
Le corselet ou « corps » - er horv-broh
Sa forme : on voit bien d’après les photos la découpe du dos (ressemblant au haut des robes de la fin du XIXème mais plus échancré). Il est fermé car il est bien ajusté à la personne, certainement avec un lacet par rapport à l’époque. Par contre, nous n’avons pas connaissance de sa partie basse cachée par la jupe.
Le tablier - en dantèr
Le tablier a une bavette et des poches de forme arrondie comme les tabliers de cérémonie portés à la fin du XIXème. Les femmes ont continué à porter ce costume jusqu’à la guerre 1914-1918, afin de l’user totalement. Il était porté aussi par les mendiantes. Avec ces vêtements, elles portaient la coiffe noire, ou la coiffe en coton blanc.
Les manchons
Pour protéger leurs manches, elles pouvaient mettre des manchons. Ces manchons se portaient avec tous les vêtements de travail.
Costume masculin
Il n’y avait pas vraiment de code vestimentaire pour la tenue de travail masculine, les hommes s’habillaient en fonction du temps, de la saison, du travail effectué et de leur condition sociale... Comme pour les femmes, ils avaient des vêtements spécialement conçus pour le travail, ou portaient des pièces de costume du dimanche abimées, afin de les user entièrement au travail (gilet, veste notamment). Un des éléments principaux du costume avec le pantalon est la chemise qui était en chanvre le plus souvent pour le travail. Contrairement à la chemise de la femme, les manches étaient longues avec des poignets et avait un petit col. Par temps chaud, ils mettaient généralement seulement un pantalon, une chemise et un couvre-chef. Ceux-ci sont divers : chapeaux de paille l’été, chapeaux de velours avec ou sans guides ; un béret. L’hiver, ils mettaient en plus un gilet ou un pull en laine, une veste. La ceinture de flanelle n’est pas portée par tous (ou pas toujours). Par contre, ils portaient toujours des sabots de bois avec ces vêtements.
Foire aux gages à Auray.
Collection le Carton Voyageur
La blouse
Dans le pays d’Auray, la blouse, principalement de couleur gris foncé, est très ample et a des formes diverses (ouverte sur le devant ou avec une encolure large arrondie). Elle est mi-longue. Les hommes portaient la blouse par-dessus le gilet et la veste, c’était un vêtement de protection, évitant de salir la veste. Dans le pays d’Auray, la blouse n’est pas devenue un vêtement de cérémonie. Il était d’ailleurs interdit d’entrer dans l’église en blouse lors des mariages, seuls les sonneurs en portaient une. Les hommes avaient pris l’habitude de laisser leur blouse à la taverne, le temps de la messe. Elle était surtout portée pour aller au marché.
Jean-Louis Le Brech né en 1875 et son fils François né en 1902 à Pluneret. Photo Zacharie Le Rouzic
Costume enfant
Au quotidien, les enfants, garçons et filles, étaient vêtus comme leurs parents avec des vêtements souvent confectionnés dans d’anciens vêtements usagés.
C’est avec ces vêtements qu’ils allaient à l’école. Les garçons portaient un chapeau ou un béret, les filles, la coiffe noire, la coiffe blanche en coton ou une coiffe « tri kintr ». Ils portaient tous des sabots.
Pour maintenir la jupe, les filles mettaient souvent une ceinture en cuir et elles avaient souvent un petit foulard autour du cou.
Ressources
- Aubert Octave-Louis, Les costumes bretons
- Audic-Brun Marie-Noëlle, Mériadec - reflets d’histoire et bulles d’enfance,
- Creston René-Yves, Le costume Breton, Coop Breizh
- Le Rouzic Zacharie, Archéologue et photographe à Carnac
- Buffet Henri François, En Bretagne morbihannaise
- Le Corre Martial, Les sonneurs bretons
- Belz Jorj, Dilhad Breizh
- Lancien Martine, Le costume traditionnel vannetais, 1988
- Le Goff Nathalie, Les métiers du costume breton dans le pays vannetais de 1789 à 1950, 1997
- Gardais Odile, Evolution du costume féminin et masculin en pays d’Auray de la fin du XVIIIe siècle à nos jours, 2004
- Musée de la carte postale, Le Carton Voyageur, Baud
- Archives départementales du Morbihan
Collection le Carton Voyageur
Remerciements
A toutes les personnes de Pluneret et des alentours qui m’ont prêté ou donné des photos, des pièces de costumes ou qui m’ont donné des témoignages sur les vêtements et les habitudes de travail d’autrefois.
Relecture : Romuald Hervé
Collection le Carton Voyageur